Archives de la catégorie ‘France’

Secrets d’un éternel été

vendredi 18 novembre 2011

Le Campari a été créé à Milan en 1860 : c’est une macération alcoolique d’herbes aromatiques, d’épices et d’écorces d’orange selon une recette  secrète. Depuis lors, cette boisson est restée constamment à la mode bien au-delà des frontières italiennes. Elle est devenue la boisson-culte de l’ère durassique car le livre dans lequel on boit la plus grande quantité de Bitter Campari est sans doute « Les petits chevaux de Tarquinia » de Marguerite Duras.

Les personnages, étouffant et suant l’ennui des années cinquante dans ce petit port italien par trop authentique, n’ont pour objectif de leurs journées de vacances que de s’attabler devant des verres de Campari renouvelés ad libitum. L’addiction se cristallise vite chez le lecteur aussi et resurgit chaque été dans une sensualité sublime : des parfums de garrigues brûlées se dégagent de l’amertume sirupeuse de la liqueur rouge, des images caniculaires se fondent dans le carmin d’une Italie mythique de vacances alanguies de touffeur, de bals de village aux rengaines faciles, d’après-midi moites d’adultère dans l’enclos des chambres obscures…

D’un usage courant, le Campari se boit pur, sur glace ou allongé d’eau gazeuse. Il est à la base de nombreux cocktails classiques, tous agréables, colorés, festifs et à la portée gustative de tous convives. Ils sont faciles et rapides à réaliser, directement dans un tumbler garni de glaçons.

Campari Soda : verser sur la glace  4cl de Campari, 2 gouttes d’Angostura, une tranche de citron et remplir d’eau de Seltz.

Campari orange : verser sur la glace  4cl de Campari, 8 cl de jus d’orange, une rondelle d’orange.

Americano : inventé par Gaspare Campari en personne, dès 1861, et nommé « Milan-Turin », ce cocktail plut tellement aux américains de passage (notamment Hemingway) qu’on l’adapta à leur goût et qu’on le renomma en 1917 « Americano » :

Versez sur la glace 4cl de Campari, 2 cl de vermouth rouge, une tranche de citron et de l’eau de Seltz.

Negroni : En 1919, le Comte Negroni, un peu las des Americano florentins plutôt légers, fit remplacer l’eau de Seltz par du gin. Idée fameuse qui n’attendit que la fin de la prohibition pour déferler sur l’Amérique. Mais attention : on entre alors dans la catégorie des « short drinks » et la dégustation devient moins anodine.

Versez sur la glace Campari, vermouth rouge et gin à proportions égales. Décorez d’une rondelle de citron.

Citons enfin pour le raffinement, une trouvaille récente, à essayer absolument au Bar du Shangri-la à Paris :

Campari s’éveille : Campari, gin, pamplemousse, champagne…

Nostalgie aux Belles Rives

vendredi 18 novembre 2011

En 1926 l’écrivain américain Francis Scott Fitzgerald et son épouse Zelda louent pour l’été la Villa  Saint Louis au cap d’Antibes… C’est le coup de foudre pour le site, la pinède en arrière-plan, la vue sur la courbe du golfe Juan, la lumière douce de la baie, le bleu tranquille de l’eau avec les îles au loin, le sable si clair d’une finesse étonnante : comme une vision de la perfection…

La terrasse des Belles Rives

« -Vous aimez cet endroit ? »

La question est posée dans Tendre est la nuit, au couple d’américains installés ici pour les vacances :

« – Peuvent pas faire autrement. Ils l’ont inventé »

répond pour eux un des invités.

Peut-on affirmer que ce sont les Fitzgerald et leurs amis qui ont lancé Juan-les-Pins ? Sans doute ont-ils propagé là un nouvel art de vivre. A présent le site grouille de touristes en été, le golfe est toujours aussi beau, le cadre exceptionnel, la Villa agrandie est devenue un hôtel de cinq étoiles dont le décor reste empreint de spontanéité folle. Chaque été la « magie Fitzgerald » s’y réinvente : une coupe de champagne servie devant la mer conte la balustrade de la terrasse où Zelda aimait s’accouder, un déjeuner bavard avec des amis sur les appontements au ras des flots, un dîner romantique sous les pins aux tables de « La passagère »… Mais l’ambiance nostalgique du bar « Le Fitzgerald » n’a pas de saison : devant le comptoir étroit délicieusement « rétro » et près du bow-window penché sur la mer, le piano noir égrène sans fin les airs des années jazz de Juan.

Les cartes et la qualité sont dignes du cadre, l’accueil est sympathique et bienveillant, la nostalgie a un prix.

Hôtel Belles Rives

33 Boulevard Edouard Baudoin        06160 Juan Les Pins

Un soir d’été en Méditerranée

mardi 14 juin 2011

Le Palais de la Méditerranée

Bâti en un temps qui n’était plus celui de « La Belle Epoque », en des années qui n’étaient déjà plus très folles, le palais de la Méditerranée, grandiose par le faste art déco de son intérieur et de son architecture, fut pour une durée comptée le lieu ultime de la fête à Nice. Parangon de la splendeur perdue de la ville, il ne reste de ce palais de rêve que sa façade monumentale évidée, rescapée in extremis de la démolition hâtive.

Et pourtant… En deçà de cette façade, on a redonné vie depuis peu à un luxe qui ne laisse pas indifférent : le casino a retrouvé sous les arcades sa place et sa frénésie d’antan, l’hôtel de 4 étoiles ranime une splendeur nostalgique par ses portes à tambour, le volume de ses halls de marbre, ses couloirs de palace… Les ascenseurs s’envolent en musique au 3ème étage où un vaste espace extérieur suspendu derrière les béances rectangulaires de la façade supporte une grande piscine et ses margelles, des fauteuils éparpillés, un piano noir… et tout au bout, contre les piliers, quelques belles tables de restaurant posées en surplomb d’un panorama époustouflant sur la baie des Anges.

C’est à l’une de ces tables dites « du bord » que vous commanderez vos dîners d’été. A l’heure de votre mise en bouche, un soleil hors champ embrase d’orangé le cap de Nice et le cap Ferrat, fait scintiller d’or les flots de la baie que votre champ de vision embrasse dans sa totalité. Au fil de votre repas, vous verrez la mer éclaircir ses nuances céruléennes et la ligne d’horizon se dissoudre en même temps que la lumière s’affaisse. Le dégradé du paysage s’attardera un temps dans un bleu clair d’opaline puis tendra vers le gris argent tandis que vous atermoierez devant le choix des desserts. A la fin du dîner, la nuit sera tombée, les lumières électriques luiront en guirlande sur la courbe de la baie, la mer brasillera sous la lune : ce sera le moment de commander une autre bouteille, de s’attarder sur le panorama de la Promenade des Anglais animée d’un croisement de foule incessant, de scruter l’opacité des plages noires d’où monteront des musiques, des chansons…

La cuisine est inventive, méditerranéenne comme il se doit, raffinée, surprenante, les saveurs délicates et précises sont bien appariées, le service est conventionnel, discret, agréable,  l’esthétique et la classe du lieu  règnent en maître jusque dans les assiettes. La cave est limitée mais efficace. Les prix, proportionnées au décor, restent abordables pour le plaisir d’un soir d’été.

Toute première fois…

samedi 7 mai 2011

Hourra ! Pour la toute première fois, j’ai trouvé des morilles ! Ce champignon mythique est décrit par Linné en 1753 sous le nom de Phallus escuelntus et ne deviendra Morchella qu’en 1794. Excellent comestible, il accompagne merveilleusement les volailles (de Bresse) à la crème, les côtes ou les escalopes de veau à la crème, les risotto (oui, à la crème aussi !). Pour toucher au divin, associer une fricassée de morilles, une escalope de foie gras de canard poëllée et un Meursault à bonne température…

Un grand merci au cercle des mycologues de Montréal qui a rendu cette cueillette possible.

Prendre le bouillon, c’est bon

mardi 26 avril 2011

Pas facile de commencer, aujourd’hui. Il faut dire que j’avais envie de vous parler du resto où travaille mon grand Raph, Les Fables de la Fontaine, rue Saint Dominique, à Paris. Mais pour vous en parler vraiment, il faudrait retrouver une palette de sensations subtiles, se replonger dans l’émerveillement, à chaque bouchée, des textures mêlées, des parfums à savourer lentement, se remémorer la fermeté fondante d’un turbot au girolles, l’éclatante douceur d’une verrine de homard, la volupté d’une mousse… « Celestiale ! » ainsi que s’exclamait ma voisine de table ce soir de juillet où j’ai découvert les Fables.  Oui, celestiale, mais pour en dire plus, j’attendrai d’y retourner et de pouvoir agrémenter de photos mon propos et vous livrer toute frémissante mon extase.

Faute de pouvoir vous parler des Fables, je m’étais mis en tête de vous parler des Cocottes voisines. Mon grand Raph, pour se changer du temps passé aux fourneaux a décidé de s’offrir et d’offrir à sa soeur une dégustation dans cet autre établissement de la constellation Christian Constant, moins raffiné que les fables, mais qui a enthousiasmé ma Cocotte à moi. J’espérais bien un compte-rendu à vous mettre l’eau à la bouche. Las ! Il m’a fallu me contenter du programme  -copieux, il est vrai- assorti d’un commentaire laconique mais efficace,  Esther dans le texte : « Potage de petits marrons avec des morceaux et une mousse de châtaigne ; Raviole de langoustine ;  Saint jaques avec endives au beurre orange ; Pomme de terre fourrée au porc et caramélisée ; Agneau et légumes de saison (asperges, petits pois, tomates confites, oignons, artichauts) ; Salade de fruits ; Gauffre avec chantilly + tarte au chocolat (la célèbre de Christian Constant) avec une sauce caramel !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Je me suis régalééééééééééééeeeeeeeeeeeeeee !! » Pas de quoi faire un article, en somme. Là aussi, ça attendra.

Il ne me reste donc plus d’autre choix que de vous parler du bouillon d’awara, mon seul horizon gastronomique actuel. Après tout, c’est de saison. Le « Bouyon wara » guyanais, c’est notre cocotte de Pâques, avec son goût de revenez-y qui vous tend son piège gustatif. Tant il est vrai que

« Menmsi oun jou mo alé a Paris
Menmsi oun jou mo alé en Italie
Menmsi oun jou mo alé a Tahiti
Mo ké toujou viré

Lò mo sonjé mo bon bouyon wara
Lò mo sonjé mo kolombo ti-djòl
Lò mo sonjé mo bon ti kalalou
Mo ké toujou viré » (Yves Cippe)

Seulement, voilà : du bouillon d’awara, que dire que l’on n’ait dit déjà ? Vous parlerai-je du fruit, avec son cuir orange vif et sa pulpe immangeable mais qui donne le jus gras dont on fait la pâte, ce fruit que l’on ramasse, mais que l’on ne cueille pas, tant les épines du palmier sont redoutables ? Des multiples ingrédients, viandes boucanées et légumes, sans compter la pâte d’awara qui donne au plat son nom ? De la lente préparation, qui occupe plusieurs jours de la semaine sainte ? De la saveur un peu fauve du plat que l’on déguste en grandes tablées familiales ?

Non, je  vous dirai simplement quelques mots de ce beau dimanche de Pâques, tout ruisselant de lumière. Des grands plats de bouillon brûlant et de riz, au milieu des amis, des chants d’oiseaux et des rires. Du ciel bleu et des feuillages verts sous le soleil de midi, du bois sombre et de la douceur de l’ombre sous le carbet, de la lenteur d’une journée de fête.

Pas très appétissante, la photo ? C’est que vous n’avez pas senti, c’est que vous n’avez pas goûté ! Car le bouillon est une surprise : une graisse orange vif baignant une masse indistincte d’épinards, de queues de cochon, de haricots, de poisson, de choux, de poulet, de concombres piquants, de crevettes. Au vrai, pas de raffinements dans ce rata mijoté des heures durant. On le cuisine en gros, c’est du travail de cantinier. Et pourtant, la magie est toujours là. Avant de vous prendre à la gorge, elle vous prend d’abord le nez.  Et là, je serais bien en peine de vous décrire le parfum du bouillon d’awara. Il n’y a pas de mots pour ça, car c’est beaucoup trop compliqué. Il y a dedans toute la Guyane avec sa flore forestière et sa faune multiculturelle. C’est pourquoi le bouillon est tout un symbole. C’est pourquoi tous ceux qui en ont goûté avant de s’en aller reviendront un jour sur le sol guyanais. C’est pourquoi ceux qui ne sont jamais encore venus en Guyane s’y rendront un jour pour prendre le bouillon.

Et vous ? Dépêchez-vous, rien n’est perdu pour cette année : prochain service pour Pentecôte.


Le MAF, quel taf !

jeudi 24 mars 2011

MAF cuisine froide, Paris, 14 mars 2011. Les 14 et 15 mars 2011 se sont déroulées les épreuves du MAF "cuisine froide" pour les départements de la Seine-Saint-Denis, Paris, l'Essonne et la Seine-et-Marne. D'autres départements et régions mettent en place le même concours dans toute la France.

Le MAF ? Non, ça ne se mange pas. Mais si vous aimez la belle ouvrage, le MAF spécialité cuisine froide ne devrait pas vous laisser indifférent, car ce concours, pépinière des talents culinaires de la France, couronne « un des Meilleurs Apprentis de France », l’un de ceux qui contribuent déjà peut-être à faire vibrer votre fibre gustative dans les bistrots tendance slow food comme dans les grands restos où viennent vous perdre vos instincts gourmets.

Les régals dont vous aimez caresser vos papilles naissent parce qu’un lent processus  a permis la métamorphose d’un adolescent ingrat en artiste des saveurs.

L’antichambre de la métamorphose est là, sous vos yeux, dans cette cuisine où s’affaire un gâte-sauce qui rêve d’étoiles. Là se sont succédés durant quelques jours des groupes de cinq ou six jeunes dont l’ambition est de faire parler d’eux dans le monde de la cuisine. Des jeunes dont la vie mijote de 8 heures à minuit chaque jour dans les coulisses d’un restaurant.

Ceux qui décrocheront la médaille d’or régionale auront gagné le droit de suer encore un peu plus au-dessus de leurs casseroles pour préparer le concours national. Ceux qui n’auront rien décroché ne seront pas découragés pour autant. Ils auront goûté à une fièvre stimulante : celle qui pousse à toujours donner le meilleur de soi-même. On les retrouvera sans doute un jour en quête d’un titre convoité de Meilleur Ouvrier de France, et sûrement en recherche derrière leurs fourneaux pour mener leur art au bout de leurs ressources.

Mais pour l’instant, ils en sont encore à revivre les moments importants de ce premier concours. La pintade était-elle à point ? Et l’assaisonnement de la chetney ? Ne manquait-il pas d’un soupçon de ceci, d’un zeste de cela ?

Une préparation, envoyée en salle par l'un des candidats. Qui ne rêverait d'être membre du jury ?

Car le sujet, concocté par Jean-François GIRARDIN, MOF Cuisine et Chef de Cuisine au Ritz était le suivant :

« Suprêmes de pintade farcis et chetney de fruits »

et

« Flan à l’orange et chocolat »

Durant quelques semaines, les candidats se sont entraînés sur leurs lieux de formation, clôturant leurs journées par des temps de pratique pour atteindre la cuisson parfaite, la découpe impeccable, la précision, la propreté, la recherche d’harmonie des saveurs, des couleurs, des proportions.

Le jour du concours, ils se sont présentés avec leur panier, rempli des ingrédients autorisés selon le cahier des charges défini dans le sujet et se sont mis au travail durant plus de quatre heures dans cette cuisine inconnue où ils se rencontraient pour la première fois, concurrents mais unis par une passion commune.

Sentez un peu ce moelleux, ce velours, ce fondant, ce croquant. C’est frais, pétillant, tendre.

De la belle ouvrage, on vous dit.  Souhaitez-leur bonne chance à tous : ils vous régaleront demain.

Photos : Blog du groupement MOF du 93

J’adore

dimanche 13 février 2011

D’abord, il y a cela, de tout simple : la volupté se passe du luxe. Elle est nichée dans des moments tout ordinaires. Il a fallu marcher, monter, marcher, monter, et là, derrière cette façade sans prétention, s’offre la douceur d’un fauteuil profond, un fauteuil à se pelotonner avec un bon vieux roman, ou bien la joue calée entre le velours tiède et le murmure d’une confidence amie. Sur la table fument un verre ou une tasse, et cette fois, le velours est dedans. Et dans l’assiette aussi, où l’éclat blanc de la meringue sur la tarte au citron donne des envies de lenteur et d’attendrissement. Et pour un temps l’on est bien là où l’on doit être, en paix avec le temps, dans la lumière paisible où le sourire de Marianne et la gaîté d’Aldo flottent comme une autre douceur.

Tartiflette

dimanche 13 février 2011

Petite nostalgie des soirées du dimanche en hiver, en France (comprendre « jamais très loin d’une bonne fromagerie ») où quelques gloutons (deux plus la cuisinière) se délectaient d’une tartiflette maison.Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la tartiflette n’a rien de traditionnel, rien de profondément savoyard.  Elle a été mise au point dans les années 1980 par le Syndicat Interprofessionnel du Reblochon pour favoriser les ventes de reblochon.

La recette s’inspire d’un gratin provençalo-savoyard et la jeunette est un délice au palais des amateurs de reblochon. Un vin blanc de Chautagne, un rouge tannique d’Ardêche ou un Beaujolais (Morgon ou Brouilly par exemple) se marient avec la belle pour le meilleur.

Le dimanche au Negresco

vendredi 14 janvier 2011

La grand salon du Negresco et sa verrière

Luxe et tradition à Nice au Chanteclerc, le restaurant du célèbre Hôtel Negresco. La cuisine créative de Jean-Denis Rieubland étonne et séduit. Le service de grande classe est digne des palaces de la Belle Epoque. Le dimanche à midi, on peut faire confiance au chef et à son sommelier pour le menu « Plaisir » (65 euros, vin et café compris)

Restaurant le Chanteclerc, 37 promenade des Anglais, NICE

Goûter au jardin

jeudi 13 janvier 2011

C’est à la villa de Rothschild, sur les hauteurs du Cap Ferrat, dans un paysage de rêve s’étendant autour de la baie de Villefranche… La tarte au citron meringué accompagnée d’un bon thé Darjeeling est une pause incontournable après la visite des somptueux jardins. (entrée : 7,50 euros, formule thé et pâtisserie : 8 euros)

Villa Ephrussi de Rothschild, 1 avenue Ephrussi de Rothschild  06230 Saint Jean Cap Ferrat