Archives de la catégorie ‘Littérature’

Nevers côté Loire

mardi 30 juillet 2013

Capitale provinciale d’une France centrale, Nevers apparaît délaissée : ce n’est nulle part vraiment. Mais sur la route des vacances, à mi-chemin de la RN 7 entre Paris et Lyon, l’étape est fascinante par sa lumière et sa sérénité.

Nevers mon amour

Nevers s’est bâti une renommée auprès des cinéphiles en 1959 grâce au film « Hiroshima mon amour », dont elle est le centre maléfique. Marguerite Duras y évoque un provincialisme enraciné qui cèle ses égarements sous le salpêtre de caves humides et Alain Resnais filme en nyctalope averti des façades austères, des toitures aiguës, des granges en ruine, des chemins sauvages, des peupliers charmants du bord de Loire. En effet, Nevers, c’est tout cela à la fois, distribué dans une vicinalité qui ne se soucie guère d’harmonie : Nevers est sans façon.

Nevers côté vins

La gastronomie y est roborative et peu onéreuse, comme dans la tradition bourguignonne, mais là c’est le vin de Loire qui coule à flots : Sancerre et Pouilly sont tout proches.
Le coup de cœur de l’été est le restaurant « Côté Loire ». Ah… cette terrasse immense qui surplombe les marais tranquilles de la Loire ! Ah… ce panorama bleu et blond dans le silence et la douceur du soir ! La cuisine est créative et compétente : samossa de rouget à la figue, lieu caramélisé sur wok de légumes et jus d’agrumes, fraisier revisité en mascarpone, basilic et citron vert, etc…

Nevers pour toujours

Et le plus étonnant, dans ce décor de bout du monde, est la carte des vins, notamment servis au verre, où les « Loire » (Sancerre, Menetou Salon, Pouilly fumé) côtoient de beaux Bourgogne, Bordeaux et Châteauneuf… La meilleure idée est de revenir au bar après le dîner pour compléter la dégustation en méditant sur la dernière réplique du scénario de Marguerite Duras : « On est là seulement encore. Et on en restera là pour toujours. Ton nom à toi est Nevers. Nevers en France »


Restaurant « Côté Loire »

Hotel Mercure Nevers Pont de Loire
quai de Médine
58000 NEVERS

On est heureux Nationale 202

lundi 1 avril 2013


La route la plus en vogue pour rejoindre la Côte d’Azur depuis Grenoble est la mythique RN 85, dite route Napoléon. J’en connais une variante tout aussi charmante.

A partir de Grenoble, la RN 75 s’enfonce vers le Trièves en lents panoramiques rotatoires pour l’ascension du col de la Croix Haute. Là, une première halte s’impose pour déguster sur la terrasse de l’auberge du col un revigorant thé Ahmad.

Vue sur les montagnes de Giono

Altitude 1180m, prairies d’alpages et sommets de sapins : c’est la croisée des chemins de Giono. Requiem de silence autour d’une tasse de thé : les « Ames fortes » ont construit le chemin de fer qui longe à présent la route. Elles reposent à Chatillon en Diois, juste à l’avers de cette montagne, après le col de la Grimone qu’on franchissait l’hiver en poussant dans les neiges la diligence de Lus avec son patachon muet…

Notre descente vers Nice se poursuit tranquillement le long de la verdoyante vallée du Buëch, avec ses berges de gros galets où paresser un moment au soleil, et ainsi jusqu’à la Durance… L’itinéraire couvre à partir de Laragne une étape de la route des fruits et des vins jusqu’à Sisteron, porte de Provence, point de ralliement historique et hautement gastronomique ( l’agneau de Sisteron, les pieds et paquets… )

Après un copieux repas, direction Digne les Bains : déambulation dans la vieille ville, achats pour un goûter de fougasse et de nougat à prendre dès les premières hauteurs de la route au-delà de la ville, en pique-nique extatique sur la vastitude du paysage.

Autour de Digne


Doublement repu, il est temps de s’attaquer à la Nationale 202, partie la plus insolite et la plus sauvage de l’itinéraire. Elle s’embranche à Barrême sur la route Napoléon : Nice n’est plus qu’à 122 km mais il faudra (sans les arrêts) près de trois heures… Et il faudra aussi s’arrêter car les villages traversés ont chacun leur histoire, leur pittoresque et leur gastronomie: Saint André des Alpes, Vergons, Annot, Entrevaux, Touët sur Var…

Entrevaux : la citadelle

La route poussiéreuse serpente, coupe et recoupe la voie métrique du train des Pignes qui brinqueballe à 60 km/h, elle se rétrécit, se tord, se perd dans les prairies, traverse les forêts, longe les lacs, franchit les cluses sur des ponts pour ânes, s’engage dans des défilés vertigineux, avant de retrouver la lumière de la vallée du Var et la descente rectiligne vers la mer. Le terme historique de la Nationale 202 se fait à la jonction de la RN 7, juste devant l’aéroport de Nice, à l’ouverture de la promenade des Anglais…

La route des Alpes de Grenoble à Nice


Et aussi pour finir : un lien musical qui donnera un peu de bonne humeur aux nostalgiques des belles routes nationales.

Délices et émotions cambodgiennes

lundi 17 septembre 2012

Une porte d’entrée du Bayon

Le sourire contemplatif et énigmatiquement bienveillant qui règne sur les visages pétrifiés d’Angkor suscite l’envoûtement du voyageur au Cambodge: est-ce là le fascinant secret d’une sérénité qui survit à ses écorchures ? L’émotion devant les prodiges architecturaux enfouis dans la jungle reste intacte malgré un tourisme plus organisé que du temps de Pierre Loti (« Un pèlerin d’Angkor »)

Mais avant cela, sur la route qui mène de Phnom Penh à Angkor, une première émotion vous attend, culinaire celle-ci. Arrêtez-vous à Skun. A l’entrée du village, une énorme structure arachnomorphe donne le ton. Plus loin, le marché gastronomique au bord de la route grouille d’animation. On s’esbaudit devant les étals odorants, on se penche sur les seaux-vivariums, on en extrait vivante une jolie bête qui deviendra proie. On l’accroche aux genoux, on la tient dans la main, on la pose sur la tête, on la câline, elle chatouille le front : la mygale est facétieuse et docile. La seconde phase est moins attendrissante (mais après tout l’humain est aussi carnassier) car la petite chose passe à la friture embrochée sur ses consœurs. Ne soyez pas triste, autour de vous on se régale, on mord à belles dents dans les pattes crochues et craquantes au goût délicat de crevette grise, on savoure le corps bombé délicieusement feuilleté, on se pourlèche, on se photographie, on filme… Si le spectacle vous afflige ou vous affecte, restez bon touriste et allez plus loin sur le marché vous consoler avec une copieuse assiette aux deux cafards.

On ne peut pas partager ce bonheur-là avec les amis au retour car la matière première est difficile à dénicher dans nos jungles urbaines … A moins d’envisager l’élevage en appartement ? Je vais en parler à mon voisin.

MiamTime: les tendances de l’hiver.

mercredi 7 mars 2012

Avant les nouvelles de printemps, un petit visuel pour résumer les sujets abordés dans MiamTime ces derniers mois:

Les tendances de l'hiver 2011-2012

Force est de constater que les préoccupations hivernales étaient plus tournées vers le Boire que le Manger :) .

Pour les amateurs, composez vos « clouds » ici .

Secrets d’un éternel été

vendredi 18 novembre 2011

Le Campari a été créé à Milan en 1860 : c’est une macération alcoolique d’herbes aromatiques, d’épices et d’écorces d’orange selon une recette  secrète. Depuis lors, cette boisson est restée constamment à la mode bien au-delà des frontières italiennes. Elle est devenue la boisson-culte de l’ère durassique car le livre dans lequel on boit la plus grande quantité de Bitter Campari est sans doute « Les petits chevaux de Tarquinia » de Marguerite Duras.

Les personnages, étouffant et suant l’ennui des années cinquante dans ce petit port italien par trop authentique, n’ont pour objectif de leurs journées de vacances que de s’attabler devant des verres de Campari renouvelés ad libitum. L’addiction se cristallise vite chez le lecteur aussi et resurgit chaque été dans une sensualité sublime : des parfums de garrigues brûlées se dégagent de l’amertume sirupeuse de la liqueur rouge, des images caniculaires se fondent dans le carmin d’une Italie mythique de vacances alanguies de touffeur, de bals de village aux rengaines faciles, d’après-midi moites d’adultère dans l’enclos des chambres obscures…

D’un usage courant, le Campari se boit pur, sur glace ou allongé d’eau gazeuse. Il est à la base de nombreux cocktails classiques, tous agréables, colorés, festifs et à la portée gustative de tous convives. Ils sont faciles et rapides à réaliser, directement dans un tumbler garni de glaçons.

Campari Soda : verser sur la glace  4cl de Campari, 2 gouttes d’Angostura, une tranche de citron et remplir d’eau de Seltz.

Campari orange : verser sur la glace  4cl de Campari, 8 cl de jus d’orange, une rondelle d’orange.

Americano : inventé par Gaspare Campari en personne, dès 1861, et nommé « Milan-Turin », ce cocktail plut tellement aux américains de passage (notamment Hemingway) qu’on l’adapta à leur goût et qu’on le renomma en 1917 « Americano » :

Versez sur la glace 4cl de Campari, 2 cl de vermouth rouge, une tranche de citron et de l’eau de Seltz.

Negroni : En 1919, le Comte Negroni, un peu las des Americano florentins plutôt légers, fit remplacer l’eau de Seltz par du gin. Idée fameuse qui n’attendit que la fin de la prohibition pour déferler sur l’Amérique. Mais attention : on entre alors dans la catégorie des « short drinks » et la dégustation devient moins anodine.

Versez sur la glace Campari, vermouth rouge et gin à proportions égales. Décorez d’une rondelle de citron.

Citons enfin pour le raffinement, une trouvaille récente, à essayer absolument au Bar du Shangri-la à Paris :

Campari s’éveille : Campari, gin, pamplemousse, champagne…

Nostalgie aux Belles Rives

vendredi 18 novembre 2011

En 1926 l’écrivain américain Francis Scott Fitzgerald et son épouse Zelda louent pour l’été la Villa  Saint Louis au cap d’Antibes… C’est le coup de foudre pour le site, la pinède en arrière-plan, la vue sur la courbe du golfe Juan, la lumière douce de la baie, le bleu tranquille de l’eau avec les îles au loin, le sable si clair d’une finesse étonnante : comme une vision de la perfection…

La terrasse des Belles Rives

« -Vous aimez cet endroit ? »

La question est posée dans Tendre est la nuit, au couple d’américains installés ici pour les vacances :

« – Peuvent pas faire autrement. Ils l’ont inventé »

répond pour eux un des invités.

Peut-on affirmer que ce sont les Fitzgerald et leurs amis qui ont lancé Juan-les-Pins ? Sans doute ont-ils propagé là un nouvel art de vivre. A présent le site grouille de touristes en été, le golfe est toujours aussi beau, le cadre exceptionnel, la Villa agrandie est devenue un hôtel de cinq étoiles dont le décor reste empreint de spontanéité folle. Chaque été la « magie Fitzgerald » s’y réinvente : une coupe de champagne servie devant la mer conte la balustrade de la terrasse où Zelda aimait s’accouder, un déjeuner bavard avec des amis sur les appontements au ras des flots, un dîner romantique sous les pins aux tables de « La passagère »… Mais l’ambiance nostalgique du bar « Le Fitzgerald » n’a pas de saison : devant le comptoir étroit délicieusement « rétro » et près du bow-window penché sur la mer, le piano noir égrène sans fin les airs des années jazz de Juan.

Les cartes et la qualité sont dignes du cadre, l’accueil est sympathique et bienveillant, la nostalgie a un prix.

Hôtel Belles Rives

33 Boulevard Edouard Baudoin        06160 Juan Les Pins

Itinéraire spiritueux

lundi 6 juin 2011

« Quand les mesures itinéraires marquant les distances d’un lieu à un autre se calculent non en kilomètres mais en litres, la vie devient un plaisant voyage »

Un itinéraire à suivre par qui aime le « bien manger », le « bien boire » et le « bien parler »…
Gérard Oberlé nous guide de province en continent sur les chemins de sa vie: promenade littéraire et culturelle dans un monde flamboyant dont les bornes d’étapes sont des banquets, des recettes, des réceptions, des cocktails, des grands vins… Les rencontres sont inattendues, les lieux insolites, les situations cocasses, les breuvages parfois indigènes. La géographie et la chronologie sont perverties par leur symbiose avec les alcools mais nous ne sommes pas perdus dans ce labyrinthe aux figures célèbres dont le fil d’Ariane est le vin, ce vin divin avec lequel l’écri-vin cultive une relation plus que fusionnelle.

At The Ritz

vendredi 3 juin 2011

Que serait un séjour à Londres sans « afternoon tea » ?

Les adresses testées, des plus banales aux plus prestigieuses, sont toutes convaincantes dans leur registre. Ainsi, de simples cafeterias de magasins surprennent par l’abondance des denrées pour une somme très modique. De nombreux hôtels proposent un service fort recommandable et certains grands établissements commerciaux (Fortnum and Mason) jouent le prestige. Plus simplement, des restaurants de musée (The National Dining rooms) proposent un choix de qualité, même si le service laisse parfois à désirer.

Mais rêvons un instant que l’Angleterre traditionnelle tient fermement debout et ressuscite son âge d’or… Mrs  Dalloway flâne dans Picadilly et avant de se tourner vers le soleil de Bond Street, vers les fleurs de sa réception du soir, elle musarde devant la vitrine de la librairie  Hatchard’s. Elle avance encore jusqu’à se rapprocher des portes à tambour du Ritz, manipulées par des valets en livrée, au-delà desquelles le tapis rouge s’enfonce au cœur de ce Londres né de la Belle Epoque en traversant les halls de marbre et de stuc, en passant devant la haie d’honneur du personnel ouvrant d’un même mouvement les battants des portes à miroirs.  Les ors, les kentias, l’élégance, le luxe, la belle tradition anglaise défilent ainsi jusqu’au Palm Court Restaurant où  s’égrène le son d’un grand piano tandis qu’on sert le fameux « Afternoon tea » avec méthode et componction.

Dans ce salon oblong au décorum baroque, les  belles tables aux nappes lisses sont bien garnies : les copieuses théières d’argent contiennent les meilleurs « Darjeeling first flush », « Lapsang Souchong Imperial », « Oolong Formose », « Ritz Royal English » (…17 sortes de thé !), l’impressionnant plateau à trois étages regorge de « finger sandwiches », de Raisins and Apple scones (accompagnées bien sûr de « clotted cream »), de belles pâtisseries miniatures…  Et pourquoi pas aussi quelques coupes de champagne ? A Londres, le Taittinger fait parfois l’impression de couler à flots…

Disons-le tout simplement : la qualité est bonne, les standards sont honorés mais l’intérêt est  aussi dans le décor et la mise en scène. Le service est orchestré, réglé comme une partition, de grands plateaux chargés de sandwiches ou de gâteaux passent et repassent où l’on peut se servir à l’envi. Prendre le thé au Ritz exige certains efforts : veste, cravate et chaussures de ville pour ces messieurs, robe habillée et escarpins pour ces dames, chapeaux si vous aimez. La réservation à l’avance est indispensable, avec choix d’un créneau horaire et ponctualité de rigueur. Passées ces exigences, tombant le masque du touriste vous serez fort bien traités.

Et si vous prenez goût à cet établissement aux propositions créatives et dynamiques, vous reviendrez tester les cocktails du bar, vous goûterez aux lunches d’été sur la terrasse côté Green park, vous raffolerez des dîners à thèmes, vous visiterez aussi la toute proche Royal Academy of Arts à l’occasion d’un forfait dîner-exposition et vous finirez bien un jour par réserver une chambre pour deux personnes avec breakfast, lunch, fleurs, fruits et champagne…  Londres ad libitum.

Une Gourmandise

dimanche 6 mars 2011

Septembre 2007, Aix-la-Chapelle. Un saut dans une librairie entre deux réunions pour trouver un successeur au roman de Pennac que je suis en train de terminer. Le voyage retour vers le sud de la France sera long, impossible de monter dans le train sans un bon roman. Prendre la suite de Benjamin Malaussène, tenir la distance et appartenir au minuscule stock de romans en français de cette belle librairie était une vraie gageure. « Une Gourmandise » l’a soutenue.

Voilà un roman à lire lentement, à savourer au fil des lieux et des mets évoqués. Plus qu’un hommage à la gastronomie, « Une Gourmandise » est un Roman Gastronomique où la Cheffe  Muriel Barbery excelle.

Le roman chez Mollat

Le blog de Muriel Barbery

Gourmandise romantique

dimanche 9 janvier 2011

Le jardin de l'Auberge Lamartine

L’auberge Lamartine est perchée sur les flancs montagneux sauvages de la rive ouest du lac du Bourget : à quelques pas de là se trouve la « grotte Lamartine », lieu symbolique du romantisme. Lors des belles journées, on déjeune aux tables du jardin surplombant le lac, sous les tilleuls, en méditant devant le panorama.

Le saint Pierre rôti et ses coquillages

Le plaisir n’est pas seulement celui de la rêverie car la cuisine est raffinée, créative, originale. Aucun plat n’est à conseiller parti- culièrement puisque tout est parfait. A chacun de choisir à la carte ou dans les menus selon ses goûts, ou mieux, de faire confiance à Pierre Marin pour le menu dégustation : une succession bien orchestrée de petits plats qui est un festival de saveurs, de couleurs : un enchantement…

Dessert aux abricots

…avec une variété de desserts qui ne finit plus d’étonner.

L’accueil et le service sont sympathiques : on revient à l’auberge Lamartine comme pour un somptueux repas de famille.

Auberge Lamartine, route du tunnel du Chat, 73370 BOURDEAU